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Mobilisation internationale pour retrouver le sous-marin argentin

 
Avec le renfort d'unités et aéronefs d'autres pays, ainsi que de navires civils, l'Argentine a déployé au large de ses côtes tous ses moyens navals disponibles, avec désormais 15 bâtiments à la mer, soutenus par cinq avions. Tous sont engagés dans une vaste opération de recherche pour retrouver le sous-marin San Juan. Armé par 44 membres d’équipage, le bâtiment, parti d’Ushuaia pour rallier sa base de Mar del Plata, demeure introuvable. Sa dernière communication avec la terre remonte à mercredi dernier. Comme le veut la procédure dans la marine argentine, qui prévoit un contact toutes les 48 heures, le San Juan devait se manifester vendredi, ce qu’il n’a pas fait.

Image d'archive du San Juan (© MARINE ARGENTINE - GACETA MARINERA)
Plusieurs tentatives d’appel samedi
Une opération de recherche a donc été lancée avec des moyens maritimes et aériens militaires, ainsi qu’une alerte aux bateaux civils croisant au large des côtes du pays. Mais la zone à couvrir est énorme, s'entendant jusqu'à 900 kilomètres au large et un millier de kilomètres du sud au nord. Cela représente une surface de 480.000 km2. S'y ajoutent des conditions météo difficiles, des vagues de 7 mètres et un vent soufflant à plus de 80 km/h. Hier, une note d’espoir est venue des autorités, qui ont annoncé que plusieurs tentatives d’appel via un système de communication par satellite étaient intervenues samedi. « Les appels, d'une durée de 4 à 36 secondes, ont été reçus samedi entre 10h52 et 15h42 (entre 13h52 et 18h42 GMT) dans diverses bases de la marine, mais la conversation n'a pas pu être établie », a expliqué le ministère argentin de la Défense, qui a estimé que cela « indiquerait que l'équipage essaie de rétablir le contact ». Si les appels ont été trop brefs pour localiser leur origine, les miliaires ont estimé que l’appareil utilisé était du même type qu’un équipement présent à bord du San Juan.

Zone de recherche et moyens déployés hier soir (© MARINE ARGENTINE)
Mauvaises conditions météo
Le fait que la communication n’a pas été établie peut être imputé aux mauvaises conditions météorologiques dans le secteur, qui pourraient empêcher l’équipage de stabiliser un signal avec le satellite. Mais cela ne donne toujours aucune indication quant à la situation du bâtiment et de ses marins, ni quand le problème, puisqu’il y en a un, s’est exactement produit depuis sa dernière communication de routine le 15 novembre. Le San Juan est-il simplement victime d’une panne de ses systèmes de transmission ou a-t-il rencontré un problème plus grave ? Est-il encore opérant ? Dans l’absolu, il était même cette nuit impossible de dire si les tentatives d’appels avaient été passées depuis le kiosque du sous-marin ou, éventuellement, à bord d’un canot de survie suite à un naufrage.

Recherches aériennes ce week-end au large de l'Argentine (© MARINE ARGENTINE)
Vu la tempête et selon les conditions à bord, le commandant a pu aussi décider, après l’échec d’une communication en surface, de replonger afin de limiter les mouvements et d’éventuels accidents, sachant que les sous-marins sont d’abord conçus pour évoluer en immersion et ont un comportement des plus inconfortables s’ils naviguent en surface par gros temps. Et le San Juan n’est pas bien grand, mesurant seulement 66 mètres de long pour un déplacement d’un peu plus de 2000 tonnes.

Le système de sauvetage SRC acheminé hier par les Etats-Unis (© US NAVY)
Mobilisation internationale
De quoi éventuellement rendre encore plus délicates des recherches déjà compliquées du fait de la mauvaise météo et d’une vaste zone à investiguer. En plus des unités argentines, d’autres pays apportent leur aide. Le Royaume-Uni a dépêché le patrouilleur polaire Protector, qui évolue actuellement dans l’Atlantique sud, alors que le Brésil a mobilisé trois bâtiments : la frégate Rademaker, le navire océanographique Maximiano et le bâtiment de sauvetage de sous-marin Felinto Perry. L’US Navy, en plus d’un avion de patrouille maritime Poseidon, complété par un Orion de la NASA, a également projeté hier un moyen de sauvetage, qui serait le cas échéant déployé sur le navire offshore Skandi Patagonia. Il s’agit d’un système SRC (Submarine Rescue Chamber), une cloche capable de plonger à un peu plus de 600 mètres. Elle a été acheminée par un avion de transport C-17 depuis Miramar jusqu’à la base argentine Comodoro Riviera.

Le HMS Protector (© ROYAL NAVY)

Les trois bâtiments mobilisés par le Brésil (© MARINE BRESILIENNE)
Toutes les hypothèses restent donc envisageables, y compris celle d’un naufrage du bâtiment avec possibilité pour tout ou partie de l’équipage d’avoir pu évacuer.
Les procédures en cas de problème sur un sous-marin
Chaque force navale a ses propres procédures et consignes, qui évoluent donc suivant les pays mais aussi selon les types de sous-marins et les missions effectuées par ces bâtiments. Sauf cas de force majeure, un sous-marin nucléaire lanceur d’engins, chargé d’assurer la dissuasion nucléaire, ne communiquera pas avec la terre pendant toute la durée de sa mission, longue de plusieurs mois. Un sous-marin d’attaque, comme le San Juan, donnera quant à lui des « nouvelles », avec une régularité dépendant de sa situation. S’il est engagé dans une opération sensible ou une action militaire, le silence sera logiquement respecté pendant toute la phase considérée à risques. En revanche, un simple transit, surtout le long des côtes nationales, se traduit par des contacts réguliers, dans le cas présent toutes les 48 heures environ.
Si le sous-marin ne se manifeste pas sans raison connue dans les délais prévus, par exemple en cas de défaillance des systèmes de transmission classiques, la procédure généralement adoptée, et suivie dans la marine argentine, est de refaire surface. Les marins doivent alors joindre la terre et rendre compte au moyen d’un appareil portable de communication par satellite. C’est ce qui, à priori, se serait déroulé samedi avec le San Juan.
Alerte internationale
Pendant ce temps, à terre, la marine qui n’a plus de nouvelle d’une unité lance une alerte sur le forum ISMERLO (International Submarine Escape and Rescue Liaison Office). Ce réseau, créé en 2003 par l’OTAN suite à la catastrophe du sous-marin russe Koursk (2000), a été depuis étendu au-delà des pays de l’Alliance Atlantique. Il vise à harmoniser les procédures de sauvetage de sous-marins, favoriser les échanges entre experts, mieux coordonner les moyens de secours disponibles dans le monde et, en cas d’alerte, réagir plus vite grâce à l’entraide internationale.
On notera que les sous-marins sont équipés de systèmes de détresse, allant des fumigènes largables aux émetteurs sonores fixes permettant le repérage d’un bâtiment ayant coulé. S’y ajoute une bouée éjectée automatiquement ou manuellement qui va rejoindre la surface et émettre un signal de détresse pouvant être capté par radio ou satellite. Aucun de ces moyens n’é été apparemment activé à ce stade, ce qui, à priori mais en restant très prudent car on ne peut pas non plus écarter une éventuelle panne, apparaitrait plutôt comme un signe positif.
En cas de naufrage
Pour ce qui est des naufrages, ils peuvent être provoqués par une collision avec le fond, un autre bateau ou un gros objet dérivant entre deux eaux et percutant le sous-marin avec suffisamment de force pour percer sa coque épaisse. Il peut aussi s’agir d’un incendie non maîtrisé à bord ou encore d’une explosion interne, par exemple sur un parc de batteries ou de l’armement. Si le sous-marin n’est plus en mesure de faire surface, l’équipage doit alors se réfugier dans une zone de survie. Il y en a généralement deux, une à l’avant et l’autre à l’arrière, avec entre les deux des cloisons et portes étanches. Chaque zone dispose d’équipements de secours, sachant que le plus important dans cette situation est de pouvoir respirer. Partant du principe qu’en cas de catastrophe les systèmes atmosphériques de renouvellement de l’air ne sont plus opérants, les zones de survie disposent d’une chandelle à oxygène et de pastilles permettant de capter les émissions de CO2 issues de la respiration et qui en concentration trop importante aboutissent à l’asphyxie. S’y ajoutent de l’eau et de la nourriture. Les naufragés, qui doivent aussi lutter contre le froid, surtout s’il y a de l’eau dans le compartiment, peuvent ainsi tenir en théorie quelques jours si le compartiment dans lequel ils sont réfugiés reste intègre.
La profondeur déterminante
De ce point de vue, la profondeur à laquelle un sous-marin coule ou est contraint de se poser sur le fond est évidemment cruciale. L’essentiel des bâtiments aujourd’hui en service ne peuvent plonger qu’à quelques centaines de mètres, autour d’un millier pour les plus résistants. Au-delà, la pression est trop importante pour la coque et provoque une implosion. Si l’accident a lieu en haute mer, par grande profondeur, les chances de survie sont nulles. En revanche, les marins d’un bâtiment qui sombre près de la côte ou sur le plateau continental ont une chance, puisque les fonds sont relativement limités. Il est alors possible de déployer des moyens de sauvetage, avec des systèmes permettant de renouveler l’air à bord et d’autres, cloches ou petits submersibles, spécialement conçus pour évacuer les équipages de sous-marins en perdition (via des sas standardisés). Tout l’enjeu est cependant, pour les secours, de connaître précisément le lieu du naufrage afin d’intervenir le plus rapidement possible.

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